Message du Prince Philippe d'Araucanie et de Patagonie

Le jour de la Souveraineté de la nation Mapuche

6 Janvier jour de la fête nationale mapuche


Marri marri pu Lonko, pu Machi,
Marri marri pu Werken, pu Ngenpin,
Marri marri pu Weupife, pu Kona,
Marri marri kompuche

Ce n'étaient pas de mes coutumes que de vous adresser en un jour aussi significatif tel que celui-ci pour notre nation mapuche, mais les évènements extrêmement graves que nous souffrons dans le Gulumapu me forcent à élever la voix.

A cette date, nous commémorons l'anniversaire du Traité de QUILIN de 1641, quand l'Espagne fut forcée de reconnaître notre indépendance et d'établir les bordures entre les deux nations, une bordure respectée par les Mapuches. Jusqu'en 1883, date à laquelle la lutte armée pour maintenir l'intégrité territoriale de notre pays se termine.

Je n'ai pas l'intention à cette occasion de commenter en détails les évènements qui rendirent inapte la nation mapuche, à assurer ce succès, sans comparaison dans toute l'Histoire de l'Amérique Latine, mais seulement de mettre en lumière quel fut le résultat de cent années de digne résistance d'une nation qui refusa d'accepter l'oppression et de vivre à genoux.

C'est dans ce passé historique dans lequel je couronnais à plusieurs reprises les armées de notre nation de victoires, que se forgèrent non seulement la fierté d'être mapuche, mais aussi l'unité nationale et le sens de l'appartenance à l'Araucanie, comme il fut ressenti dans le Wallmapu, territoire ancestral de la nation Mapuche. C'est ce passé historique qui aujourd'hui inspire et renforce les défenseurs des droits souverains de notre nation.

Comme il est largement reconnu, la lutte Mapuche pour le recouvrement de leurs terres, la défense de leurs ressources naturelles, l'exigence à prendre part dans les décisions prises concernant les projets entrepris sur leur territoire, aussi bien que leur combat contre la destruction environnementale sont toutes des revendications justifiables basées sur de solides fondements et qui méritent le soutien de tous ceux qui ont une conscience sociale et le sens de la Justice. Cependant, comme nous le savons, ces exigences ont été criminalisées par le gouvernement chilien, avec pour résultat une répression incontrôlable et irrationnelle, dans laquelle hommes, femmes, anciens et enfants ont tous été les victimes. Ces incidents ont tous été largement documentés par toutes les organisations nationales et internationales des droits de l'Homme et dénoncées dans des milliers de pages écrites par des Mapuches et des corps sociaux de toutes parts du le monde.

L'assassinat de Matías Valentín Catrileo Quezada le 3 Janvier 2008 encore une fois démontre son courage, le pouvoir de l'Etat chilien et la vie des Mapuches. Dans une protestation pacifique pour recouvrer le territoire usurpé par l'homme d'affaires Jorge LUCHSINGER mais appartenant aux communautés mapuches du YUPECO, la police, toujours préoccupée de défendre les hommes d'affaires et les propriétaires terriens, ouvrit le feu à la mitrailleuse, sur la communauté alors qu'elle tentait de mettre le jeune homme mortellement blessé à l’abri. Je voudrais présenter mes plus sincères condoléances à la famille, à la communauté concernée et à toute la nation mapuche en général.

La Maison Royale se joint aux appels à la justice civile pour enquêter sur la mort de notre peñi (frère) et justifie sa position de méfiance à l'égard du Procureur, qui cherchera surement un moyen d'absoudre la culpabilité de ce vil et lâche assassinat de toutes responsabilités. Nous devons aussi ne pas oublier l'assassinat du jeune Alex LEMUN. Le verdict obtenu par les militaires, fut d'absoudre le chef des carabiniers, Marcos TREUER de toute responsabilité. Ce n'est qu'un exemple de la justice chilienne, par laquelle le chantage judiciaire, pour absoudre cette culpabilité des attaques contre les Mapuches, pendant que conclure à la culpabilité de Mapuches innocents, est une pratique normale de l'Etat de Droit du Chili.

Nos remerciements vont aux évêques d'Araucanie, Messeigneurs Camilo VIAL et Sixto PARZINGER pour leur participation aux discussions entre les Mapuches et les autorités chiliennes, et pour leur solidarité en ces temps cruels pour les Mapuches, qui, comme dans le passé, souffrent du despotisme d'un gouvernement qui a décidé de criminaliser les revendications justifiées des communautés mapuches dans un conflit territorial qui refuse de trouver une solution politique.

Il est de notoriété publique qu'aujourd'hui au Chili les prisonniers politiques mapuches ne peuvent compter sur des procès équitables. Sous la loi anti-terroriste ou le Droit pénal, lors d'un procès devant une Cour militaire ou pénale, la règle est la présomption d'innocence. Cependant, pour les détenus mapuches cette présomption d'innocence est remplacée par une présomption de culpabilité. N'importe quelle suspicion contre un leader mapuche entraîne immédiatement sa détention préventive (jusqu'à la fin de l'investigation). Il peut s'écouler un an avant que la sentence ne soit prononcée. Pour tous les concernés il n'y a ni compensation, ni dommage d'aucune forme, ni d'injures, ni de traumatisme soufferts.

Au Chili "démocratique" le racisme et la discrimination envers les détenus mapuches est à l'ordre du jour. Ces détenus n'ont aucune garantie de leur sécurité physique ou mentale car leur statut de prisonnier politique n'est pas reconnu. Ils sont contraints sans aucune discrétion, à rester avec les criminels de Droit commun par lesquels ils sont attaqués à cause de leur nationalité mapuche. Il résulte de cela bon nombre d'attaques, comme celles de Luisa CALFUNAO et Ernesto LINCOPAN pour n'en citer que deux. N'oublions pas le prisonnier politique mapuche Julio HUENTECURA tué par des détenus de la prison de haute sécurité de Santiago. De manière similaire, pour la Lonko Juana CALFUNAO détenue actuellement dans la prison de Temuco, l'appel demandant sa protection fut rejeté par la Cour de jugement oral de Temuco le 14 Décembre 2007 ce qui nous montre une fois de plus la manière dont le gouvernement chilien méprise la vie des prisonniers politiques mapuches. La répression gouvernementale s'étend aussi aux mineurs comme dans l'affaire de José GAVARINO LEPICHEO âgé de 17 ans, dont la détention va à l'encontre de ses droits internationalement reconnus.

L'injustice des convictions, du racisme et de la discrimination ont poussé Patricia TRONCOSO à l'état de dépression et à considérer l'abandon de sa propre vie, ayant reçu des promesses qui comme l'année précédente, n'ont pas été tenues. Elle n'a pas non plus obtenu le minimum des réductions et malgré avoir fait plus de cinq des dix ans de sa condamnation et s'être bien comportée n'a pas accéder aux réductions de peine prévues par la Loi. Aujourd'hui elle se bat pour une vie sous sérum, ce qui prolonge un peu plus son agonie. Nous payons un tribut à Patricia et à tous ceux qui ont mené ces dernières années de longues grèves de la faim -des modèles de dignité, de courage et de force morale, qui ont donné mauvaise conscience au personnel de la prison. Toutefois, je supplie Patricia de ne pas sacrifier sa vie. La nation mapuche a besoin de femmes d'un tel acabit et d'une telle dignité vivantes dans le but de continuer à contribuer à la lutte pour de meilleurs lendemains.

Ce panorama de totale impuissance auquel les prisonniers politiques mapuches font face ont amené à la plus longue grève de la faim de l'Histoire chilienne. Commençant le 10 Octobre 2007 avec cinq patriotes mapuches, c'est précisément la force qui provient de notre glorieux passé et de la dignité de la nation mapuche qui tous deux les motivent eux et leurs convictions de la justesse de leur combat. Nous regrettons le caractère borné et l'aveuglement des autorités chiliennes qui face aux demandes justes des leaders et des autorités mapuches répondent par la répression politique et légale. C'est une situation qui ne fait qu'augmenter la mobilisation, la radicalisation et le désir de mettre en doute un Etat régi par la Loi, le rôle des services de sécurité et leur loyauté à l'égard de l'Etat chilien.

La destruction de gros engins ces dernières semaines, associés ou appartenant à des compagnies forestières, par des groupes non identifiés soutenant notre combat contre l'usurpation de notre territoire et la destruction de l'environnement, est le résultat de la criminalisation d'une protestation pacifique et de l'inutilité de la justice chilienne. Le gouvernement chilien est responsable de cette nouvelle phase de la lutte mapuche et de la fermeture de toutes les portes possibles menant à une solution acceptable aux vrais revendications mapuches à cause de l'application des lois anti-terroristes introduites durant le régime dictatorial de Pinochet.

RETROUVER L'INDEPENDANCE POLITIQUE ET TERRITORIALE EST IMPERATIF

Comme nous l'avons énoncé auparavant le conflit mapuche n'est pas seulement un problème de pays et de pauvreté, mais aussi de territoire et d'autodétermination. En d'autres termes, c'est un problème politique et historique qui commença avec l'occupation militaire de l'Araucanie par l'Etat du Chili au prix de dizaines de milliers de vies mapuches, le vol de 95% de notre territoire et la soumission politique à la classe politique chilienne.

Nous croyons fermement et nous soutenons la création d'un Parlement mapuche autonome avec pour principal objectif de renforcer les formes de participation dans les secteurs économique, politique et social. Ce Parlement sera apte à présenter les factures qui autoriseront de nouveaux mécanismes et procédures pour la participation autonome et représentative de la nation mapuche dans la société et l'Etat.

Ce droit est inhérent à notre nation, reconnu par quelques trente Traités internationaux, de nombreux documents des Nations Unies et dans la Résolution des Nations Unies sur les peuples indigènes du 13 Septembre 2007, qui fut soutenue par le gouvernement chilien. En ne considérant que cela ne pouvons-nous pas accélérer la reconnaissance des droits et la protection des peuples indigènes. Jusqu'à présent, le Parlement  chilien a été incapable de légiférer en conformité avec les normes internationales. La plus attendue des ratifications de la Convention 169 de l'O.I.T. n'est pas encore cristallisée et de ce fait la réforme constitutionnelle et les lois communautaires n'ont pas prospéré.  En résultat à l'usurpation de nos territoires et au manque d'initiative de développement économique dans les communautés mapuches, une énorme migration vers les grandes villes fut le seul moyen de survivre. En ces temps d'épreuves, nous devons nous unir pour se confronter aux multiples attaques que notre nation souffre quotidiennement. Notre Histoire atteste que confrontée à une forte agression notre nation est capable de surmonter pour vaincre.

Nous sommes les fils et les filles de Leftraru, Kalfulikan, Fresia, Pelentraru, Janequeo, Kilapan, Kalfucura et de milliers d'autres, célèbres ou anonymes, qui dans un front uni donnèrent leur sang pour obtenir des droits pour notre nation. Des droits sacrés et inaliénables auxquels notre nation ne devrait jamais renoncer. Aujourd'hui alors que l'ensemble du monde regarde le développement du conflit mapuche avec inquiétude, nous devons être dignes de nos ancêtres. Nous sommes unanimes dans le respect de nous-mêmes et de nos droits nationaux.

¡Marrichiweu!

Philippe,
Prince d'Araucanie et de Patagonie.
Paris, 6 Janvier 2008

Traduit de l'anglais par: Amandine SAEZ-VANDEVILLE

 

________________

Haut de page^^