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COMMUNIQUE DE PRESSE

Une lettre de protestation aux autorités chiliennes

La société civile de différents pays d'Europe adresse une lettre de protestation aux autorités chiliennes et internationales pour défendre un dirigeant Mapuche

Paris, 21 février 2005

Une lettre ouverte vient d'être adressée aux autorités politiques et judiciaires chiliennes par différents groupes, associations et personnes de pays d'Europe qui ont accueilli en novembre dernier le dirigeant mapuche Juan Pichun à l'occasion de sa tournée d'information organisée par la Fédération Internationale des Droits de l'Homme (FIDH). L'objet de cette lettre ouverte est d'exprimer leur préoccupation et de dénoncer la situation de persécution et de harcèlement que subissent Juan Pichun et son frère, Carlos Pichun.

En effet, le dirigeant et son frère ont été sommés de se présenter devant le Procureur de Traiguen comme suspects d'avoir participé à un incendie forestier dans cette commune. Face à une situation de persécution permanente et réitérée à l'encontre de cette famille et de sa communauté – persécution démontrée et dénoncée à différentes occasions devant les tribunaux chiliens et les instances internationales – les signataires de la lettre considèrent cette mise en demeure judiciaire « d'acte arbitraire qui viole la présomption d'innocence, de harcèlement, de persécution et de tentative d'intimidation envers une personne reconnue internationalement pour avoir révélé les problèmes et les incohérences d'un pays qui se revendique comme un modèle de démocratie en Amérique Latine et en Europe ».

Les signataires rappellent les requêtes déjà présentées le 11 février 2005 par l'Observatoire pour la Protection des Défenseurs des Droits de l'Homme (CHL 001/0205/OBS 012) lesquelles ont pour objet de garantir les droits de Juan Pichun et des autres personnes concernées par les dites accusations ainsi que le respect des accords et déclarations internationaux des Droits de l'Homme signés par l'Etat chilien et les signataires concluent  leur lettre par  «  La nécessité par l'Etat chilien de respecter et de mettre en application les différentes recommandations émises tant par les organisations non-gouvernementales que par celles qui dépendent des Nations Unies et qui aboutissent toutes à la même obligation de ne pas criminaliser les demandes légitimes des peuples indigènes et de procéder à une amnistie générale pour les défenseurs indigènes des Droits de l'Homme  »

Il est important de signaler que cette lettre adressée au Président de la République, Ricardo Lagos, sera également adressée au Ministre des Relations Extérieures, Maria Soledad Alvear, au Ministre de l'Intérieur, José Miguel Insulza, au Ministre de la Justice, José Antonio Gomez, et au Président de la Cour Suprême, Hernan Alvarez Garcia. Cette lettre ouverte sera remise durant la semaine aux différentes représentations diplomatiques – ambassades et mission permanente auprès des Nations Unies à Genève. De même il sera remis une copie de cette lettre à Benita Ferrero-Waldner, Commissaire européen des affaires extérieures, au Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'Homme et des libertés fondamentales des indigènes, Rodolfo Stavenhagen, et au Représentant des droits de l'homme pour l'Amérique latine et les Caraïbes du Bureau du Haut Commissariat pour les Droits de l'Homme des Nations Unies, Pedro Vera. Une réponse des différentes personnes et institutions interpellées sera attendue.

Cette lettre ouverte est signée par l'Association des Réfugiés d'Amérique Latine et des Caraibes (Belgique), le Centre Culturel Latino-américain Sub Terra (Bruxelles, Belgique), le Comité de Solidarité avec les Indiens des Amériques (Paris, France), le Comité de Solidarité avec les Peuples du Chiapas en lutte (Paris, France), la Coordination d'Information et de Soutien au Peuple Mapuche et aux Prisonniers Politiques au Chili (France), La Défense Internationale des Droits des Peuples (Suisse), le Groupe de Soutien à Léonard Peltier (France) et le Comité Mémoire et Justice : Chili - Suisse - Amérique Latine. D'autres  signatures sont attendues dans la semaine.

Lettre ouverte actualisée et disponible dans le site : http://mapuche.free.fr/carta

Pour plus d'informations écrire à mapuche@free.fr

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Face aux événements survenus récemment nous déclarons ce qui suit :

Nous sommes différents groupes, associations et individus de la société civile de différents pays européens qui ont eu l'occasion de rencontrer le dirigeant Mapuche Juan Pichun durant son voyage en Europe, organisé par la Fédération Internationale des Droits de l'Homme (FIDH). A cette occasion, Juan Pichun a fait connaître la situation de répression qui existe aujourd'hui dans différentes communautés Mapuche de la zone sud du Chili, et en particulier l'emprisonnement que subit son père, Lonko (autorité traditionnelle reconnue), et la persécution à l'égard de sa communauté de Temulemu : la maison de sa famille a été perquisitionnée huit fois en un laps de temps de deux mois, deux de ses frères sont recherchés par la justice pour ne pas avoir payé une amende relative à une condamnation liée au conflit territorial qui oppose plusieurs communautés de la région avec des entreprises forestières et des particuliers, parmi lesquels on trouve le très influent Juan Agustin Figueroa, ex-ministre de l'Agriculture et actuel membre du Tribunal Constitutionnel.

Le 8 novembre 2004, tandis que son père était en train d'affronter, avec sept autres dirigeants mapuches, un nouveau jugement pour association illicite à caractère terroriste (jugement dont tous les accusés furent acquittés en première instance après de nombreux mois de détention préventive), Juan Pichun fut invité à s'exprimer devant la 33e Session du Comité des Droits Economiques, Sociaux et Culturels dans le Palais des Nations Unies de Genève, session durant laquelle il demanda une minute de silence en hommage au jeune Alex Lemun, rappelant au monde que l'assassinat du jeune mapuche par un membre identifié de la police demeure, deux années plus tard, toujours impuni.

Nous avons appris par des sources dignes de foi que Juan Pichun et son frère, Carlos Pichun, sont aujourd'hui menacés d'arrestation à la suite de la mise en demeure du Procureur de Traiguen, Sergio Moya, pour leur supposée participation à l'incendie d'une propriété forestière survenu ces dernières semaines. D'autre part, nous connaissons les étranges circonstances dans lesquelles ont été arrêtés les frères José de la Rosa et Lorenzo Nahuelpi Millapan, membres de la commune voisine de Pantano : arrêtés au cours d'un important déploiement policier, ils ont été inculpés et mis en prison préventive pour « un vol de bicyclette survenu six mois auparavant », cependant le Procureur Sergio Moya les a interrogés au sujet de l'incendie pour lequel il veut incriminer Juan Pichun et son frère.

Malheureusement, ce n'est pas la première fois que les procureurs qui enquêtent sur les causes des conflits mapuches tentent de faire pression sur les membres des communautés : une des méthodes est de les arrêter et de les inculper pour des faits mineurs ou insignifiants afin de pouvoir faire pression sur eux et qu'ils reconnaissent ensuite être coupables d'un délit plus grave ou qu'ils dénoncent leurs voisins en échange de l'abandon des charges prononcées contre eux. Nous craignons que Juan Pichun soit la prochaine victime de cette lecture fatale du principe d'opportunité, clé d'un système judiciaire qui, paradoxalement, prétend garantir un procès convenable à tous les accusés.

Malheureusement beaucoup de personnes qui sont en train de payer le coût de ce conflit irrésolu sont les dirigeants des communautés qui ont osé s'exprimer publiquement. Beaucoup d'entre eux ont été emprisonnés, mis en accusation, persécutés et condamnés à des amendes élevées, à des peines de prisons avec sursis ou fermes, tandis que d'autres, voyant le peu de garanties qu'ils auraient d'être jugés équitablement ont décidé de fuir. De nouveau, nous voyons la même histoire se répéter, ceux qui lèvent la voix pour dénoncer les injustices qu'ils vivent et revendiquer leurs droits sont aujourd'hui menacés de sanctions judiciaires et de prison.

Nous regrettons que l'Etat, la classe politique chilienne et le président Lagos ne parviennent pas à résoudre un conflit qui avant tout est de caractère politique, préférant appliquer toute la force de la loi pour taire ces revendications légitimes. Nous considérons la mise en demeure judiciaire émise contre Juan Pichun et son frère comme un acte arbitraire qui viole la présomption d'innocence, un harcèlement, une persécution et une tentative d'intimidation envers une personne reconnue internationalement pour avoir révélé les problèmes et les incohérences d'un pays qui se revendique comme un modèle de démocratie en Amérique Latine et en Europe. Aussi nous voulons insister sur le fait que s'il est certain que Juan Pichun, lors de son voyage en Europe, a dénoncé avec détermination la violence avec laquelle l'Etat chilien maltraite sa famille et le peuple Mapuche, il a toujours encouragé une solution pacifique à ce conflit où puisse se développer une coexistence juste et harmonieuse entre le peuple Chilien et Mapuche.

En conséquence et en accord avec la requête de l'Observatoire pour la Protection des Défenseurs des Droits de l'Homme, nous exigeons du gouvernement du Chili :

  1. De prendre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité et l'intégrité physique et psychologique de MM. Juan Pichun , Carlos Pichun Collonao , José de la Rosa Nahuelpi Millapan et Lorenzo Manuel Nahuelpi Millapan , et de tous les chefs et défenseurs des droits des Communautés des Mapuche au Chili ;

  2. De mettre en liberté MM. José de la Rosa Nahuelpi Millapan et Lorenzo Manuel Nahuelpi Millapan et tous les membres et chefs Mapuche détenus arbitrairement, de faire garantir effectivement par les autorités chiliennes l'administration correcte de la justice, le déroulement équitable du procès incluant la présomption d'innocence afin que cesse la pratique des détentions arbitraires conduisant exclusivement à la coercition et à l'intimidation de la part de l'Etat envers les communautés mapuches ;

  3. D'assurer une enquête immédiate, exhaustive et impartiale à propos des accusations et de la « judiciarisation » dont viennent d'être victimes les personnes ci-dessus mentionnées.

  4. De garantir l'application des dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des Droits de l'Homme, adoptée par l'Assemblée Générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, en particulier en ce qui concerne la protection du droit de toute personne « (…) individu ou en collectif à promouvoir la protection et la réalisation des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales sur les plans national et international et à lutter pour eux (Art. 1), de même qu'en ce qui concerne le devoir de l'Etat de garantir « … la protection par les autorités compétentes de toute personne, individu ou en collectif, face à toute violence, menace, représailles, discrimination, négative de fait ou de droit, pression ou toute autre action arbitraire résultant de l'exercice légitime des droits mentionnés dans la présente Déclaration » (Art. 12.2) ;

  5. De manière générale, de conformer ses actions au contenu de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et les Accords et Conventions Internationales ratifiées par le Chili.

Nous ajoutons la nécessité pour l'Etat chilien de respecter et de mettre en application les différentes recommandations émises tant par les organisations non-gouvernementales que par celles qui dépendent des Nations Unies (en particulier les recommandations du Rapporteur Spécial sur la situation des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales des indigènes, Rodolfo Stavenhagen, de même que les recommandations du Comité des Droits Economiques, Sociaux et Culturels) et qui aboutissent toutes à la même obligation de ne pas criminaliser les demandes légitimes des peuples indigènes et de procéder à une amnistie générale pour les défenseurs indigènes des Droits de l'Homme. Nous considérons que de telles mesures légitimes devraient concerner en premier lieu et de manière urgente les personnes qui aujourd'hui se trouvent privées de liberté dans différents centres pénitentiaires du sud du Chili pour avoir participé à des mobilisations dont l'objectif était la revendication de leurs légitimes demandes territoriales comme c'est le cas de Pascual Pichun Paillalao, Aniceto Norin Catriman, Patricia Troncoso Robles, Jorge Manquel Torres, José Nain Curamil, Patricio Marileo Saravia, Jaime Marileo Saravia, José Francisco Llanca Ahilla, Victor Ancalaf Llaupe et Jaim e Huenchullan.

Signataires :
- Association de Réfugiés d'Amérique Latine et des Caraïbes - ARLAC - Belgique.
- Centre Culturel Latino-américain Sub Terra - Bruxelles - Belgique.
- Asociación de Refugiados de Latinoamérica y del Caribe - Bélgica.
- Comité de Solidarité avec les Indiens des Amériques – CSIA - Paris - France.
- Comité de Solidarité avec les Peuples du Chiapas en lutte - CSPCL - Paris - France.
- Coordination d'Information et de Soutien au Peuple Mapuche et aux Prisonniers Politiques au Chili – CISMAPU - France.
- Défense Internationale des Droits des Peuples – DIDEPU - Suisse.
- Groupe de Soutien à Léonard Peltier – LPSG - France.
- Comité Memoria y Justicia : Chile - Suiza - América Latina.

Destinataires en copies:

• S.E. Ricardo Lagos Escobar, Président de la République du Chili
• Mr. José Antonio Gómez, Ministre de la Justice
• Mme. María Soledad Alvear, Ministre des relations extérieures
• Mr. José Miguel Insulza, Ministre de l'Intérieur
• Mr. Hernán Alvarez García, Président de la Court Suprême de Justice
• Mr. Rodolfo Stavenhagen, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'Homme et des libertés fondamentales des indigènes
• Mr. Pedro Vera, Représentant des droits de l'homme pour l'Amérique latine et les Caraïbes du Bureau du Haut Commissariat pour les Droits de l'Homme des Nations Unies
• Mme. Benita Ferrero-Waldner, Commissaire européen des affaires extérieures
• Mission Permanente du Chili aux Nations Unies à Genève.
• Délégations diplomatiques en Europe.

N'hésitez pas à participer à cette campagne en signant cette lettre et en l'envoyant aux adressent suivantes :

• Mission Permanente du Chile aux Nations Unies à Genève, 58, Rue de Moillebeau 1211, Genève Case postale 332.
Fax :+4122.734.52.97 TEL: +4122.919.88.00
E-mail: mission.chile@ties.itu.int

• S.E. Ricardo Lagos Escobar, Presidente de la República, Palacio de La Moneda, Santiago, Chili.
tel: (+562) 690 40 20; tel: (+562) 699 03 94 ;
e-mail : ricardolagos@lagos.cl ; redlagos@icono.cl ; internet@presidencia.cl

• José Antonio Gómez, Ministerio de Justicia, Morandé 107, Santiago Casilla 21, Santiago, Chili.
tel: (+562) 674 31 00 ; fax: (+562) 698 70 98 ;
e-mail: minju@reuna.cl

• María Soledad Alvear, Ministerio de Relaciones Exterior, Catedral 1158, Santiago, Chili.
tel: (+562) 679 42 00;
e-mail: minrel@minrel.cl

• José Miguel Insulza, Ministerio del Interior, Palacio de la Moneda, Santiago, Chili.
tel: (+562) 690 40 00;
www.gobiernodechile.cl

• Hernán Alvarez García, Presidente de la Corte Suprema de Justicia
tel: (+562) 698 05 61 / fax: (+562) 695 21 44

• Sr. Rodolfo Stavenhagen, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'Homme et des libertés fondamentales des indigènes.
OHCHR, United Nations, 1211 Genève 10, SUISSE.
e-mail: pespiniella@ohchr.org
Tel: +41 (0) 22- 9179413 / Fax: +41 (0) 22 9179010

• Sr. Pedro Vera,Représentant des droits de l'homme pour l'Amérique latine et les Caraïbes du Bureau du Haut Commissariat pour les Droits de l'Homme des Nations Unies, UNOG-OHCHR, CH-1211 Genève 10, SUISSE.
e-mail: pvera-pineda@ohchr.org,
Tel: +41 (0) 22-9179013, Fax: +41 (0) 22-9179013

• Benita Ferrero-Waldner, Commissaire européen des affaires extérieures. B-1049, Bruxelles. BELGIQUE.

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