Benetton gagne, le Peuple Mapuche perd.


IPS – Buenos Aires, 1 juin 2004


" La loi est pour les ‘huincas’ (Argentins), pour nous, il n’y a toujours pas de démocratie." a déclaré Mauro Millán, un dirigeant de la communauté Mapuche-Tehuelche á Inter Press Service (IPS). La declaration de Millán vient après une décision légale qui prend 300 hectares de terre á une famille Mapuche pour retourner á l’entreprise italienne Benetton.

Par Marcela Valente

Le lundi soir, un juge du sud de la province de Chubut a rendu un verdict contre Atilio Curinanco et Rosa Rua Nahuelquir, un couple Mapuche qui occupait depuis 2002 la terre avec leurs quatre enfants.
D’après le jugement, le couple indigène doit quitter la terre car elle appartient á l’entreprise Southern Argentinian, gérée par l’entreprise italienne de vêtements Benetton qui possède 970 000 hectares de terre dans cette province.

La famille Mapuche a fait une demande á l’Instituto Autárquico de Colonización, (IAC) (Institut pour les disputes de la terre) á Chabut afin de résider sur la terre oú leurs ancêtres ont vécu sans avoir d’acte de propriété. Après six mois d’attente pour que la demande soit traité et n’ayant reçu aucune réponse, ils décident d’occuper la terre : Ils travaillent la terre, réparent les barrieres, élèvent du bétail et construisent un logement de fortune.

D’après Monsieur Curinanco, la famille a présenté ses plans écrit á l’IAC, qui les a oralement autorisés á s’installer sur la terre en août 2002.

Mais, deux mois plus tard, une douzaine d’officiers de police avec des chiens sont soudainement apparue á Leleque et ont expulsé la famille. La police prétend que l’entreprise Benetton possède la terre.

L’entreprise Benetton a intenté une action en justice contre la famille pour avoir résisté á l’éviction et a engagé des poursuites dans le but de régler le problème de propriété de la terre. M. et Mme Curinanco-Rua Nahualquir ont refusé l’offre de l’entreprise de conclure á un accord en dehors de la court..

Même si les charges, pour avoir résisté á l’éviction ont été rejetées, la court á juger que la terre appartenait á Benetton.

Le porte-parole de Benetton, Alberto Mazzuchelli a déclaré : "Le gouvernement national et local, va devoir régler le problème de logement de la communauté Mapuche." Il ajoute : "Comme entreprise, ce que l’on fournit, c’est du travail."

Le cas a réveillé des attentes. Il a été observé comme un test sur le droit des Indigènes qui fait partit de la législation régionale et de la Constitution de ce pays de 37 millions d’habitants dont suivant une estimation non-officiel, entre 800 000 et 2 millions sont indigènes.

La Constitution déclare que le peuple Mapuche est garantit de "la possession et de la propriété qui est occupé traditionnellement" et également que " aucune (de ces terres) n’est cessible".

Mais le système légal a soutenu de violente éviction de famille Mapuche, qui ont également été emprisonnés, et des outils, une charrue ainsi que deux bœufs ont été saisis.

En plus, le système légal a maintenant déclaré Benetton "propriétaire permanent" de la terre. Cette décision est basée sur un registre de la terre de 1896, quand le peuple Mapuche de cette région a résisté á la campagne militaire connue sous le non de "conquête du désert".

Pendant cette campagne, des milliers d’indigènes ont été tués par l’armée afin de prendre leur terre qu’elle a ensuite distribuée á des particuliers pour leur usage personnel.

En 1896, au milieu de cette conquête, le gouvernement a utilise les même 970 000 hectares de terres que Benetton contrôle depuis 1991, de la Southern Argentinian Land Company ( Entreprise Terrestre d’Argentine du Sud)– une entreprise d’origine Anglaise.

La Southern Argentinian Land Company a été crée quand le gouvernement lui a transféré la terre. Le peuple Mapuche pense qu’une enquête doit être faite sur le transfert par le Corps Législatif.

"Au XIXème siècle, l’Argentine a ouvert ces frontières aux immigrants étrangers, mais nous, les peuples indigènes, nous avons été exterminés. Pour cette raison, les terres de l’intérieur de la Patagonie, avec toutes les communautés vivant dessus, ont été données aux Anglais" a déclaré Millàn.

Le représentant des peuples indigènes se réfère à la prédominance de propriétaire d’origine Anglaise dans le sud du pays, une région riche en huile et gaz naturel et ou il y a beaucoup de ferme d’élevage de moutons.

Millàn espérait que la décision légale serait en faveur de la famille Mapuche, ce qui aurait permis á des milliers d’indigènes déplacés vers les grandes villes de Patagonie á la recherche de travail de retourner sur leurs terres.

Mais ça n’est pas arrivé car, il dit : "Le système judiciaire et la loi appartiennent au Huincas (Argentins)".

Avant l’arrivée des Espagnols au XVeme siècle, le peuple Mapuche (qui dans leur langue signifie "peuple de la terre") vivaient dans la région sud de ce qui est appelé aujourd’hui Argentine et Chili.

Un million et demi de Mapuche vivent au Chili. En Argentine, ils sont 200 000 et suivant une étude par l’Organisation National Catholique pour le Soutien des Indigènes, (Equipo Nacional de Pastoral Aborigen), 94% ne possède par d’acte de propriété de leur terre.

"La communauté Mapuche d’Argentine a été chassée dans un coin et poussé á vivre sur les pires terres ; Les plus sèches et les plus inhospitalières. Ils ont été uniquement autorisés á occuper des terres sans actes de propriété, et contrairement á la loi de la région n’ont pas été aidés á compléter la procédure afin de devenir propriétaire permanent de la terre", a déclaré Gustavo Macayo, avocat et commanditaire de la famille Curinanco-Rua Nahuelquir á IPS.

Dans un autre cas, Macayo a permis de mettre en examen un juge qui a autorisé une éviction sur le motif de ne pas s’être acquitté de leurs droits. Pendant le jugement, le juge Eduardo Colabelli a été radié par la cour pour racisme et ignorance de la loi.

C’est sous le jugement du juge Eduardo Colabelli que l’éviction de la famille Curinanco a été ordonnée.

Macayo qui défend les peuples Mapuche et Tehuelche dans plusieurs affaires concernant les terres, les discriminations et l’emploi, a déclaré : "En regardant ce résultat négatif, il y a toujours des questions qui se posent. Une enquête doit être mise en place concernant le problème du transfert de la terre, qui occupe une région équivalent á un cinquième de la région de Chubut".

"La majorité du peuple Mapuche vit dans les ghettos surpeuplés des villes d’Esquel, de Comodoro, de Rivadivia ou d’El Maitèn et sont victimes d’évictions constantes et souvent accompagnées de violence" a expliqué l’avocat.

Il ajoute : "Cependant l’Etat n’a jamais engagé d’action. Il montre une indifférence totale, ce qui laisse la terre ouverte aux gros propriétaires pour étendre leur territoire."

Le problème existe depuis plus d’un siècle et Mauro Millán prévoit qu’il dure encore un certain temps en raison de la position incertaine de la population indigène au regard de leur terre. Il se rappel, ses grands-parents ont été expulsés des terres communes et ses parents étaient employés dans une hacienda (grande ferme) appartenant á la Southern Argentinian Land Company.

Le représentant Mapuche ajoute : "Notre peuple a seulement été autorisé à occuper la terre sans avoir d’acte de propriété. Ces actes sont uniquement pour ceux qui sont juste arrivé c’est á dire Italiens, Allemands ou Suisses. Mais nous, qui avons toujours habité sur ces terres, nous n’avons aucun droit."

Millán a été poursuivit pour avoir protesté contre les expulsions. A son avis, l’Etat intervient uniquement pour priver les peuples indigènes de leur droit en utilisant la police et le système judiciaire.

" Je me suis toujours demandé : qu’est qui se passe quand une famille Mapuche décide d’utiliser son droit et de retourner sur sa terre afin de vivre dans la tradition ? Apparemment nous n’avons pas la liberté de faire ça. Il y a beaucoup á discuter sur la démocratie et le droit humanitaire, mais pour nous, pour les peuples indigènes, ce temps n’est pas venu " se lamente Millán.

Traduit par Sabine.

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